"Festen" ou une drôle de fête de famille
Je viens de revoir "Festen" pour la énième fois et je jubile toujours autant!
Je dois être maso pour à ce point aimer les histoires de famille avec règlements de comptes. Je me passionne pour l'analyse des rapports frères/soeurs, père/fils ou fille mère/ fils ou fille. Et je suis généralement gatée au niveau du cinéma :).
Xavier Dolan avec "Jai tué ma mère" m'a sidérée en montrant de façon si crue le mépris d'un fils pour sa mère (la scène où il ne peut pas la supporter quand elle mange).
J'ai tué ma mère (CAN 2009) Xavier Dolan - incipit
Le "modèle" est bien évidemment la famille du Parrain, qui fait peur. J'avoue adorer aussi les grandes fratries dans les films d'Alexandre Arcady, qui met souvent en scène des familles pied-noir.
J'ai été scotchée par la violence du propos de "Pardonnez moi" par Maiwenn.
Hélène de Fougerolles "Pardonnez moi"
Bref, les scènes de repas qui dégénèrent, j'ADOOORE.........
Alors, "Festen", est un film de Thomas Vinterberg sorti en 1998 (et qui a d'ailleurs obtenu le prix du jury à Cannes).
Ce film obéit aux principes du Dogme 95 à savoir un style vif, nerveux, brutal et réaliste, manifesté généralement par un tournage entrepris avec une caméra 35 mm portée au poing ou à l'épaule et avec improvisation de plusieurs scènes. C'est un film quasiment en huis-clos; le lieu principal étant l'hôtel du père de Christian. Ce même Christian est le personnage principal. Il se rend à l'anniversaire du patriarche et retrouve sa soeur, son frère Michael, raciste et violent. On apprend que sa soeur jumelle s'est suicidée il y a peu. Or, Christian a une vérité à délivrer, une bombe, qui va faire voler en éclats les apparences et l'hypocrisie.
La scène de repas est interminable et correspond à la difficulté de Christian à parler. Il s'y reprend trois fois, à chaque fois il va se heurter à l'aveuglement, à la volonté de régler les choses "en privé", de sauvegarder les apparences. La violence est omniprésente dans ce film, qu'elle soit dans les paroles ou les actes. Mais Christian est résolu à dire la vérité (l'image de Christian ouvrant les portes avec fracas). Comme dans tout film du dogme, il n'y a pas de musique ajoutée, la caméra suit Christian dans ses tentatives, je dirais presque dans son calvaire puisqu'on va le rouer de coups et l'attacher à un arbre pour le faire taire. Entre chaque révélation, les invités rient, dansent et boivent comme si de rien n'était. J'ai aimé la complicité du cuisinier et des employés du père de Christian qui l'encouragent, cachent les clés de voiture des invités pour forcer tout le monde à demeurer et à affronter la révélation.
A la fin, le père tombe le masque, il est "lâché" par son épouse et on se dit que cet "accouchement dans la douleur" a porté ses fruits: Christian sourit, les liens entre les frères et soeurs sont renforcés.
Je me pose beaucoup de questions sur la société danoise après avoir vu de nombreux films (notamment 'La chasse") ou lu des romans (surtout policiers) la mettant en scène: est-elle si violente et conservatrice? Les allusions aux idées d'extrême-droite sont fréquentes et troublantes.
Bref, vous ne sortirez pas indemnes de "Festen" :)
A noter que j'ai été très déçue par la suite de "Festen" au théâtre: j'ai été très mal à l'aide à cause du propos: on suit Christian à un autre repas de famille et on comprend qu'il est pédophile à son tour. Drôle de message, la pédophilie comme fatalité.